Balade poétique sur les pas de Charles Baudelaire

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Mise à jour le 05/10/2021

Gustave Courbet (1819-1877). "Charles Baudelaire" (1821-1867), écrivain français, 1848. Montpellier, musée Favre.
Figure incontournable de la littérature française, Charles Baudelaire a passé presque toute sa vie à Paris, qui fut une source d'inspiration et le théâtre de ses frasques. Le 9 avril 2021 a marqué le 200e anniversaire de sa naissance. L'occasion de marcher dans les pas de l'auteur des « Fleurs du mal ».

Baudelaire, un nomade parisien

Le poète a eu au cours de sa courte vie, pas moins d'une quarantaine de domiciles dans la capitale. Du quartier latin où il est né et où il passera les vingt premières années de sa vie jusqu'aux cafés des Grands Boulevards en passant par les ruelles de l'île Saint-Louis, le poète n'a cessé d'arpenter les rues parisiennes. En ce siècle d'urbanisation, Baudelaire a connu trois visages de Paris en mutation : l'ancien Paris, l'époque de la transformation et enfin, le Paris d'Haussmann. Ville pleine de contrastes, de la grande misère au raffinement luxueux, elle a participé par sa violence et par sa beauté à l'inspiration du poète maudit.
Théâtre du Châtelet.  Anonyme , Photographe  Entre 1860  2e moitié du 19e siècle   Musée Carnavalet, Histoire de Paris

LE QUARTIER LATIN, LIEU DE SON ENFANCE

Tout a débuté au 13, rue d'Hautefeuille dans le 6e arrondissement où le jeune Charles nait le 9 avril 1821. Il vit une enfance heureuse et choyée avec sa mère avec qui il entretient une relation fusionnelle et exclusive. Son père, Joseph-François Baudelaire meurt quand il n’a que six ans. Et cette relation mère-fils si chère au jeune Charles va être perturbée par le remariage de sa mère l'année suivante avec le chef de bataillon Jacques Aupick. Les relations familiales se dégradent. Charles sera toujours en opposition par rapport aux valeurs bourgeoises incarnées par son beau-père.
La Rue Hautefeuille, Lansyer, Maurice Emmanuel , Peintre  En 1886   Musée Carnavalet, Histoire de Paris
Après une parenthèse lyonnaise, la famille revient à Paris en 1836 et s’établit au 32, rue de l’Université (7e). Alors âgé de 14 ans, Charles est inscrit comme pensionnaire au collège Louis-le-Grand (5e), et obtient le deuxième prix de vers latins au concours général. Mais il se fait remarquer par son caractère rebelle. Renvoyé du collège, il réussi son bac de justesse et commence à mener une vie de marginal.
Sa famille essaye de mettre fin à cette attitude dissolue en l’envoyant en Inde. Cependant, Charles n’arrive même pas à destination, un naufrage l’oblige à être rapatrié à Paris. Toute sa vie, Baudelaire ne s'éloignera jamais vraiment de la Ville Lumière, comme aimanté par elle. Commence alors pour le jeune poète, une vie dissolue.

L'île Saint-Louis, la vie de bohème

Après ce voyage raccourci, il retourne à Paris et perçoit sa partie de l'héritage laissé par son père. Il y mène une vie de dandy et en seulement deux ans, dépensera la moitié de son héritage, ce qui lui causera un fort endettement. Il vit, à cette époque quai de Béthune, sur l’île Saint-Louis. C’’est là qu’il avait pour habitude de recevoir Jeanne Duval, sa maîtresse, surnommée « La Vénus noire », avec laquelle il connaîtra les charmes et les amertumes de la passion.
Quartier symbolique de la vie du poète, l’île Saint-Louis, où il occupe de nombreux logements, sera le lieu où Baudelaire passera les plus belles années de sa vie. Le poète aime se promener sur l'Île et être au cœur de Paris sans pour autant en subir le chaos. Il apprécie cette vie de «village» peuplé d'artistes. Quand il le souhaite, il rejoint le Marais en traversant le pont Marie et la rive gauche en traversant celui de la Tournelle, payant à l'époque. Il se rend au restaurant La Tour d'argent (5e), où il a ses habitudes. Situé à l'angle de la rue du Cardinal Lemoine, le restaurant existe toujours sous le même nom mais n’a plus rien en commun avec son apparence à l’époque de Baudelaire.
Tour d'argent
C'est d'ailleurs à cette époque, en 1842, qu'il est contraint de travailler pour subvenir à ses besoins. Il devient critique d’art, critique littéraire et journaliste. Il admire les œuvres d’Eugène Delacroix et d’Edgar Poe dont il devient le traducteur attitré. Il emménage ensuite sur le quai d’Anjou, dans le célèbre Hôtel de Lauzun (précédemment dénommé l'hôtel Pimodan), tenu par le baron Jérôme Pichon. L’aristocrate loue une partie des lieux à Charles Baudelaire ainsi qu'à d'autres écrivains comme Théophile Gautier ou Roger de Beauvoir. Ils y mènent une vie de bohème et participent à des dîners où ils consomment une confiture verte, notamment à base de haschisch, formant ainsi le fameux « club des Haschischins ». Baudelaire y étudiera le haschisch et l'opium et relatera ces expériences dans Les paradis artificiels.
À partir de 1846, il change maintes fois de domicile : d’abord à l’hôtel Corneille, puis au 33, rue Coquenard (aujourd’hui rue Lamartine), ensuite à l’hôtel de Dunkerque, à l’hôtel Folkestone, au 24 rue de Provence, au 7 rue de Tournon et bien d’autres encore. Si le poète a écumé les tavernes du Quartier latin, il a aussi pas mal trimbalé son spleen du côté des faubourgs Montmartre et Saint-Denis, dans les 9e et 10e arrondissements, quartiers sulfureux dans le Paris pré-haussmannien, réputés pour leur vie nocturne, leurs maisons de jeux ou de libertinage. Il y fréquente de nombreux établissements comme Le Peletier au 5 de la rue du même nom, café très fréquenté par les auteurs de l’époque comme Gérard de Nerval ou Théodore de Banville.
Gare de l'Est, 10ème arrondissement, Paris  Anonyme , Photographe  Entre 1850 et 1900  2e moitié du 19e siècle   Musée Carnavalet, Histoire de Paris
En 1848, Baudelaire participe aux barricades aux côtés des républicains, mais ses ardeurs révolutionnaires s’éteignent rapidement. Comme Flaubert ou Victor Hugo, il ne s’engage pas du point de vue littéraire.

Le cimetière du Montparnasse, sa dernière demeure

La dernière escale de ce parcours baudelairien nous amène à l'évènement qui marqua d'un sceau funeste l'existence du poète maudit. Nous sommes alors en 1957. Baudelaire publie ce qui sera sans nul doute sa plus grande œuvre : Les Fleurs du mal.
Page de couverture du livre "Les Fleurs du Mal" (volume I) par Charles Baudelaire, Ambroise Vollard éditeur, 6 rue Laffitte, Imprimerie Nationale, Paris, 1916. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.
Publié le 21 juin 1857, le livre scandalise aussitôt la société conformiste. Les Fleurs du mal sont poursuivies pour « offense à la morale religieuse » et « outrage à la morale publique et aux bonnes mœurs ». Couvert d'opprobre, son auteur subit un procès retentissant. Le magistrat est Ernest Pinard, celui qui avait mené le procès contre Flaubert et son livre Madame Bovary, quelques mois plus tôt.
Baudelaire tente de se défendre mais la condamnation est sans appel : aux trois-cent francs d'amende s'ajoute la censure de six pièces jugées immorales. Les Bijoux ; Le Léthé ; À celle qui est trop gaie ; Lesbos ; Femmes damnées [Delphine et Hippolyte] ; Les métamorphoses du Vampire sont retirés des Fleurs du Mal.
Ces poèmes condamnés resteront interdits de publication en France jusqu'à ce que la Cour de cassation rende, le 31 mai 1949, un arrêt annulant la condamnation de 1857. Très rares sont ses contemporains à soutenir Baudelaire. Seuls Théophile Gauthier, Jules Barbey D'Aureville et Victor Hugo lui témoignent leur admiration. Ce dernier écrira d'ailleurs « Vos Fleurs du Mal rayonnent et éblouissent comme des étoiles ».
Charles Baudelaire (1821-1867), poète français.
Cet échec et l’appréciation négative qui met en doute sa santé mentale le minent. Très endetté, il part habiter à Bruxelles. Il sombre alors dans la misère et la maladie. En 1866, il est frappé d’un malaise qui le rend aphasique. On le ramène à Paris. Il est aussitôt admis dans la maison de santé du docteur Guillaume Émile Duval, aliéniste réputé. L’établissement se trouve 1, rue du Dôme, dans le quartier de Chaillot (16e).
Il meurt à Paris le 31 août 1867 à l’âge de 46 ans. Il est inhumé au cimetière du Montparnasse (6e division), dans la tombe où repose son beau-père détesté, le général Aupick, et où sa mère le rejoindra quatre ans plus tard.
Le cénotaphe de Baudelaire est situé entre les 26e et 27e divisions du cimetière parisien du Montparnasse. Il a été sculpté par José de Charmoy et inauguré en 1902 en l'honneur du poète. Le projet, lancé en 1892, fit l'objet d'une querelle qui retarda de dix ans sa réalisation et dissuada Auguste Rodin d'y participer. Ce monument ne doit pas être confondu avec sa tombe située dans le même cimetière.

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